L’écriture académique, entre recherche et pédagogie

Le choix de la dénomination écriture académique, de préférence à écriture universitaire ou écriture de recherche ou écriture scientifique correspond à une volonté de ne pas dissocier pédagogie et recherche quand il s’agit d’écriture. Trop souvent, en effet, l’enseignement et l’apprentissage de l’écriture académique, c’est-à-dire la rédaction des documents produits en contexte de recherche dans le champ de l’université mais aussi des organismes de recherche (mémoire, thèse, rapport, article, compte rendu, note, ouvrage…) sont confinés à l’un des deux grands domaines qui constituent les universités, pédagogie d’un côté, recherche de l’autre.

Cette division binaire est institutionnelle  : il y a les institutions d’enseignement, comme les unités de formation ou les départements disciplinaires, et les institutions de recherche, comme les équipes ou laboratoires ; et les grands conseils qui administrent les universités reproduisent fidèlement cette division, commission de la recherche d’un côté et commission de la formation et de la vie universitaire de l’autre. Elle est aussi  inscrite dans la dénomination de notre métier même : nous sommes des “enseignants-chercheurs“, des “EC” et notre “service” d’enseignement est scrupuleusement décompté et séparé de nos activités de recherche. Mais elle est aussi pratique et cognitive, ou plus exactement c’est sans doute parce qu’elle est institutionnelle qu’elle nous est imposée et que nous l’intériorisons volontiers sur les plan pratique et cognitif : en effet, nous distinguons bien nos activités, préparation des cours et enseignement d’un côté, rédaction d’articles et préparation de conférences de l’autre, pour ne donner que ces exemples.

Tout cela est clair, sauf à propos de quelques activités, dont l’écriture académique, qui produit des écrits académiques. Quand il s’agit d’apprendre aux étudiant·es à rédiger leur mémoire, leur thèse, leur premier résumé, leur premier article, alors les discussions commencent (particulièrement quand cela engage des financements). Puisque c’est doctoral, c’est de la recherche ; puisque c’est de la formation, c’est de la pédagogie ; puisque ça entre dans “la formation à la recherche et par la recherche” (mystérieux slogan au cœur de la nouvelle culture doctorale mise en place en France au début des années 2010), alors c’est de la… mais quoi, au juste ? Pédagogie ou recherche ? Il y a du pour et du contre, et on s’y perd.

Et c’est normal, car les relations entre enseignement et recherche sont complexes, et peu compréhensible sous le prisme de la distinction binaire habituelle. Je vais entendre ici par écrits académiques l’ensemble des textes produits en contexte universitaire à partir du master : écrits universitaires validant des UE ou des formations (dossiers, rapports de stage, comptes rendus), écrits d’initiation à la recherche (projets de recherche en master et doctorat, mémoires de master), écrits d’entrée dans la recherche (thèse, premiers articles) et leurs sous-genres spécifiques (introduction et conclusion, description de méthodologies, états de l’art, présentation et ou description de données ou de corpus, notes de bas de page, bibliographies…).